Une lettre ouverte au préfet de la Loire Atlantique signée par la majeure partie des associations qui gèrent des dispositifs d’hébergement, d’accès au logement, d’insertion sociale ; professionnelle et de formation. Ces associations représentent plus de 1 500 salariés sur le territoire ; « l’exclusion de nombreux professionnels de la revalorisation dite « Ségur social» et les conditions déplorables de  sa mise en œuvre nous amènent à vous alerter et à demander votre soutien pour faire évoluer la position actuelle du gouvernement. »

Monsieur le Préfet,

Nous, Présidents, Administrateurs et Directeurs d’établissements du secteur social, médico-social et de l’insertion professionnelle de la Loire-Atlantique, souhaitons vous faire part de notre incompréhension et de notre colère vis-à-vis :

– de l’exclusion de nombreux professionnels de la prime de 183 € accordée au personnel socio- éducatif ;

– des conditions de sa mise en œuvre.

Nos associations œuvrent à l’accueil et à l’accompagnement de personnes en situation de grande précarité à travers des dispositifs d’hébergement, d’accès au logement, d’insertion sociale et professionnelle et de formation. Depuis des années, les professionnels du secteur souffrent d’un manque de reconnaissance, d’une perte de sens et d’un durcissement de leurs conditions de travail.

Or, nombre d’entre eux restent exclus de cette revalorisation : personnels administratifs, agents logistiques, agents de maintenance et d’entretien, conseillers en insertion professionnelle, encadrants techniques, écoutants du 115, etc. Leur mission est pourtant essentielle pour accompagner les personnes les plus fragiles de notre société. 30 à 50 % des salariés se trouvent ainsi exclus de cette revalorisation.

Cette situation nous paraît à la fois injuste, inéquitable et contreproductive.

– Injuste, car la majorité des salariés exclus comptent parmi les plus petits salaires du secteur, principalement occupés par des femmes. Ces salariés voient depuis des années leur pouvoir d’achat baisser dans un contexte de forte inflation. Nombre d’entre eux sont rattrapés par le SMIC, voire par le seuil de pauvreté.

– Inéquitable, car en ne ciblant que les travailleurs sociaux, la prime Ségur oublie des professionnels essentiels, comme la crise sanitaire l’a récemment mis en lumière. Sans eux, comment maintenir en état les bâtiments qui hébergent des personnes à la rue ? Comment assurer la bonne gestion de nos établissements ? Comment travailler dans de bonnes conditions quand un travailleur social n’est pas éligible à cette prime alors que son collègue qui intervient auprès du même public la perçoit ? Comment permettre à des salariés en insertion de se remobiliser par le travail ?

L’insertion par l’activité économique (IAE), comme la formation au français (FLE) sont partie intégrante du travail social Leurs exclusions paraissent incompréhensibles à l’heure où l’accès au logement ne va pas sans insertion dans l’emploi qui lui-même ne va sans une maîtrise minimale du français.

– Contreproductive, car cette demi-mesure ne résout pas le manque de reconnaissance du secteur.

Les relations sociales se tendent entre salariés et employeurs, dans des institutions dépourvues de marges budgétaires. Les métiers concernés sont ceux pour lesquels nos structures entrent en concurrence avec le secteur marchand. Aujourd’hui, il est quasiment impossible de recruter un comptable, un agent de maintenance ou un menuisier avec les niveaux de salaire proposés. De plus en plus de postes restent vacants. Les équipes et les usagers en souffrent.

Pour les postes éligibles, le financement du Ségur reste incertain et sa mise en œuvre extrêmement complexe. Au lieu d’apporter des solutions, la mesure fragilise nos structures et leurs actions.

– À ce jour, nous ne disposons d’aucune garantie sur le financement de la prime. Pour l’Etat, le financement se fait par des crédits non-reconductibles qui seront versés, dans le meilleur des cas, en novembre. Or, la prime est due aux salariés à compter du 1er avril 2022. Charge aux associations d’assurer la trésorerie, bien souvent en recourant à des services bancaires onéreux.

– Pour les collectivités territoriales (Conseil Départemental, intercommunalités), aucune règle n’a encore été édictée. Verser une prime non financée ferait peser un risque important sur nos organisations et sur leur pérennité.

– La mise en œuvre du Ségur est chronophage pour les administrations comme pour nos structures.

Chaque poste concerné doit être justifié à travers des tableaux interminables. Pour les postes cofinancés, la gestion s’avère encore plus complexe. Comble de l’absurde, ce travail est réalisé par des salariés administratifs eux-mêmes exclus du Ségur (comptables, gestionnaires de paye, cadres administratifs).

– Enfin, le versement du Ségur entraîne de nouvelles cotisations patronales. Dans certains cas, le surcoût dépasse le financement octroyé par l’Etat (439 € par mois et par salarié).

Nous souhaitons ici réaffirmer le soutien et l’accompagnement sans faille de nos structures, de nos conseils d’administration et des directions d’établissements envers les professionnels oubliés du Ségur. L’ensemble des salariés est déterminé à obtenir gain de cause.

Nous espérons pouvoir compter sur votre appui en vue de :

– transmettre les difficultés décrites au gouvernement, aux élus des collectivités de notre territoire ainsi qu’aux parlementaires ;

– faire remonter les besoins financiers nécessaires à l’extension du Ségur à tous les professionnels à travers le financement complet des surcoûts, une revalorisation des tarifs de certains dispositifs et une revalorisation de l’aide au poste pour le secteur de l’IAE.

Simplifier la mise en œuvre en mettant fin à l’ « usine à gaz » actuelle

La revalorisation de 3,1 % des salaires du médico-social privé annoncée le 15 septembre par le Ministre des Solidarités, de l'Autonomie et des personnes handicapées ne compense que partiellement une perte de pouvoir d’achat d’environ 13% sur les dix dernières années.

Dans l’hypothèse où les diverses mobilisations sociales de la semaine du 26 septembre 2022 ne produiraient pas d’effet, nos structures se verraient contraintes d’envisager de nouvelles modalités de mobilisation au profit des personnes accompagnées et des professionnels engagés.

Nous vous prions de bien vouloir agréer, Monsieur le Préfet, l'expression de notre haute considération.



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